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Quand la photographie questionne le droit d’auteur

Une décision récente de la Cour d’appel de Rennes rappelle classiquement que l’originalité de l’œuvre photographique peut résulter des choix du photographe (quant à l’angle de prise de vue, l’éclairage, la singularité de la mise en scène, par l’usage d’une technique particulière de tirage) qui, librement opérés, traduisent, au-delà du savoir-faire d’un professionnel de la photographie, une démarche propre à son auteur.

Par ailleurs, la Cour était saisie de questions cruciales pour le propriétaire d’un fonds photographique.

Focus

Dans cette affaire, le petit-fils de l’auteur d’une collection de photos des 24 heures du Mans avait assigné en contrefaçon le cessionnaire du fonds de commerce du studio familial pour avoir publié, dans un ouvrage, près de 200 clichés issus des négatifs et des plaques photographiques de cette collection restée dans la réserve du magasin, sans autorisation, ni mention du nom de leur auteur.

Sur renvoi après cassation, la Cour considère que :

• Le petit-fils justifiait bien de sa qualité à agir en tant qu’ayant droit (unique) de ses parents décédés, dont sa mère qui a elle-même hérité seule en sa qualité de fille unique de la succession de son propre père, identifié comme l’auteur de la plupart des photographies du fonds ;
• La vente des négatifs et des plaques de verre n’emporte pas cession des droits d’auteur sur les photographies dont elles sont issues ; c’est la distinction entre la propriété du support matériel et les droits sur l’œuvre elle-même ;
• L’acte de cession du fonds de commerce photographique, taisant sur ces points, ne saurait justifier la cession des droits d’auteur pour exploiter les tirages existants ou pour effectuer des retirages ;
• Les photographies reproduites prises durant la course des 24 heures du Mans procédaient d’un parti pris qui était celui de restituer, non pas les pilotes, les automobiles et leurs performances ainsi que cela est généralement fait pour tout sport automobile, mais la vie autour du circuit et l’atmosphère particulière qui y régnait. Il en résulte que ces photographies sont originales, au sens du Code de la propriété intellectuelle, et doivent bénéficier de la protection au titre du droit d’auteur.

L’action en contrefaçon est en conséquence jugée bien fondée.

⚖️ Cour d’appel de Rennes, 5 décembre 2023, n° 22/04884